Eclairage sur la situation des droits homosexuels en Colombie : un tableau contrasté.
Une adoption reconnue juridiquement, un coming-out ministériel et un suicide révoltant. Ces trois événements médiatisés dressent un tableau contrasté de la situation des droits homosexuels en Colombie.
Droit à l’adoption : la décision de la Cour Suprême.
Fin août, la Cour suprême colombienne a autorisé Ana Leiderman à adopter la fille de sa compagne Veronica Botero. Les deux femmes ont remporté une victoire décisive auprès de la plus haute juridiction du pays, cette décision marque une étape de plus vers l’égalité des droits en Colombie. Si le mariage homosexuel est interdit, il existe des formes d’union civile autorisées aux couples homos.
Coming-out ministériel.
Les mentalités évoluent dans ce pays qui n’est pourtant pas à la pointe des droits LGBT en Amérique latine. Pour reprendre les mots de la Ministre du Commerce, de l’Industrie et du Tourisme, Cecilia Alvarez “ heureusement l’époque des persécutions et du rejet, c’est du passé ”. En effet, Cecilia Alvarez a récemment déclaré vivre en couple avec une femme, la ministre de l’Education Gina Parody. Ce coming-out gouvernemental a eu un fort retentissement par sa simplicité et surtout par la bénédiction implicite du président Santos qui y voit un moyen d’apparaître comme plus progressiste auprès de son électorat, au risque de se couper d’une autre partie plus conservatrice.
« La gota que rebasó mi copa[1] » (« la goutte qui fit déborder mon vase »).
L’affirmation de la ministre Cecilia Alvarez sur la fin d’une « époque du rejet » a été brusquement démentie par la nouvelle du suicide de Sergio Urrego, un jeune collégien homosexuel de 16 ans. Sergio a mis fin à ses jours après avoir été victime de discriminations et de pressions de la part des responsables de son collège privé el Gimnasio Castillo Campestre à Bogotá. Dans une lettre d’adieu il dénonce clairement les humiliations dont il a été victime de la part de l’équipe « éducative » de son collège. Son témoignage a été diffusé dans le quotidien El Espectador par sa mère, Alba Reyes, qui se bat aujourd’hui pour prévenir des cas semblables. Ce suicide, un parmi tant d’autres, à pourtant réveillé les consciences. Le nombre d’articles sur le sujet disponible sur El Espectador et leur partage sur les réseaux sociaux illustre l’impact de ce suicide dans la société colombienne. On y trouve des témoignages de membres d’établissement scolaire comme celui-ci, anonyme parce que son auteur craint des représailles ou encore celui d’une professeure d’université qui appelle à une réflexion nationale sur cette « peur de la diversité » ou le témoignage d’un sociologue qui dit que « Sergio ne s’est pas suicidé, c’est la discrimination dans son collège, l’inaction de l’Etat et l’indolence de la société dans laquelle il vivait qui l’ont tué. ». L’histoire de Sergio Urrego est devenue un symbole de la lutte pour les droits LGBT, le ministère de l’Education nationale a rappelé qu’aucune discrimination n’était tolérable au sein d’un établissement scolaire, le Tribunal de Cundinamarca a reconnu que Sergio Urrego a été victime de discrimination et Alba Reyes se bat aujourd’hui pour que son fils obtienne son diplôme à titre posthume.
Capture d’écran du site elespectador.com de l’article par lequel le suicide de Sergio a été révélé. On y voit la photo de la mère de Sergio Urrego portant une photo de son fils dans les mains et à gauche le nombre de partage de l’article sur Facebook (64 138) et de « retweet » (RT) sur Twitter (9 678).
- Pour en savoir plus, consulter le site de l’association LGBT Colombia Diversa
Nicolas SAUVAIN
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