Temer(aire)

Temer(aire)

Michel Temer (Parti du mouvement démocratique brésilien, PMDB), président du Brésil depuis la destitution de Dilma Rousseff en août 2016, fait face aux démons du pays : la corruption.

Michel Temer et Dilma Roussef en novembre 2015

Le Tribunal supérieur électoral (TSE) enquêtait sur le financement de la campagne électorale de 2014. Michel Temer était alors « sur le même ticket » que la présidente destituée, puisqu’il était son vice-président. Les comptes de campagne ont été examinés par le TSE à cause des soupçons d’irrégularités, et notamment de financements illégaux, provenant de la corruption.  Vendredi 9 juin 2017, après quatre jours de délibérations, les sept juges ont voté, à quatre voix contre trois, pour un non-lieu, évitant l’annulation du mandat de Temer. Herman Benjamin, le rapporteur de l’affaire disait pourtant qu’avec le nombre de preuves dont le tribunal disposait, “il ne [faisait] pas de doute” que la campagne électorale de 2014 -qui aurait coûté 86 millions d’euros- avait bénéficié de fonds détournés du groupe pétrolier national Petrobras. Mais c’est le président du TSE, Gilmar Mendes, qui a eu le dernier mot. Il a estimé qu’ “il [valait] mieux payer le prix d’un gouvernement mauvais et mal choisi que celui de l’instabilité du système”.

 

Michel Temer se disait serein et confiant, et répétait ne pas vouloir quitter le pouvoir. Le 18 mai, il disait : “Je ne démissionnerai pas. Je le répète, je ne démissionnerai pas”. Temer a donc accueilli avec plaisir le verdict du tribunal, en expliquant que ce jugement montrait que “les institutions continu[ai]ent de garantir le bon fonctionnement de la démocratie brésilienne”. Il dispose donc d’un moment de répit pour essayer de faire passer les réformes qu’il souhaite mettre en place, notamment celle sur le système des retraites, qui prévoit une hausse du départ de l’âge en retraite à 65 ans. Celle-ci risque d’être d’autant plus difficile à mettre en place que le principal allié du gouvernement Temer, le Partido da Social Democracia Brasileira (PSDB, centre-droit), qui dispose de quatre ministres, menace de faire défection. Alors que le président bat tous les records d’impopularité, la situation économique du pays reste très compliquée : malgré une croissance d’un pour cent au premier trimestre 2017, par rapport au dernier trimestre de l’année précédente, la croissance brésilienne devrait rester très faible (0,2% en 2017), pénalisée par un endettement public grandissant.

 

Mais plusieurs chefs d’accusation pèsent encore contre Michel Temer : “corruption passive”, “obstruction à la justice” et “participation à une organisation criminelle”. Le scandale de corruption Petrobras touche une grande partie des parlementaires et des ministres brésiliens, et Temer apparaît dans plusieurs accusations. Les révélations faites mi-mai par le journal brésilien O Globo d’une conversation, enregistrée par les patrons de la société agroalimentaire JBS, montre un président approuvant la nécessité de payer pour faire taire un témoin encombrant, Eduardo Cunha. Ce dernier est l’ancien président de la Chambre des députés, et l’initiateur du procès en destitution de l’ex-présidente. Mais depuis, il a été condamné à quinze ans de prison pour corruption, entraînant avec lui dans sa cellule de “nombreux secrets compromettants” selon ce même journal. Et comme une histoire en cache toujours une autre, cette même conversation enregistrée évoque aussi la “résolution d’une affaire”, affaire résolue par Rocha Loures, proche de Temer. Et finalement, Rocha Loures “a été filmé en train de recevoir une valise contenant” 140 000 euros, donnée par l’un des patrons de la même société JBS. Cette somme aurait été délivrée à M. Temer lui-même, pour “acheter le silence”  d’Eduardo Cunha.

 

Malgré tout, Michel Temer continue de s’accrocher à son mandat présidentiel, estimant qu’un nouveau flottement à la tête de l’Etat mettrait à mal l’économie du pays, qui se remet lentement des deux années de récession précédentes. Un beau mélange de corruption, qui semble ne pas avoir de fin. Les prochaines élections présidentielles doivent se tenir fin 2018. Les Brésiliens espèrent un renouveau politique, pour en finir avec ces affaires qui entachent la réputation du pays et sa crédibilité.

 

Sources :

“Brésil : petit répit pour le président Temer sur le plan judiciaire”, Ueslei Marcelino, RFI, le 10 juin 2017. URL : http://www.rfi.fr/ameriques/20170610-bresil-petit-repit-le-president-temer-le-plan-judiciaire

 

“Corruption au Brésil : le president Michel Temer sauve (de peu) son mandate”, Chantal Rayes, Libération, le 10 juin 2017. URL : http://www.liberation.fr/planete/2017/06/10/corruption-au-bresil-le-president-michel-temer-sauve-de-peu-son-mandat_1575868

 

“Au Brésil, le president Temer sauve son poste sur le fil”, Les Echos, le 10 juin 2017. URL : https://www.lesechos.fr/monde/ameriques/030377104314-au-bresil-le-president-temer-sauve-son-poste-sur-le-fil-2093291.php

 

“Por 4 a 3, TSE ignora provas e livra Temer de cassaçao”, Carolina Brígido, André de Souza et Eduardo Bresciani, O Globo, le 9 juin 2017. URL : https://oglobo.globo.com/brasil/por-4-3-tse-ignora-provas-livra-temer-de-cassacao-21459638

 

“Brésil. Le président Michel Temer sauve sa tête”, Courrier international, le 10 juin 2017. URL : http://www.courrierinternational.com/article/bresil-le-president-michel-temer-sauve-sa-tete

 

“Brésil. Un president devant ses juges”, Courrier intnernational, le 6 juin 2017. URL : http://www.courrierinternational.com/une/bresil-un-president-devant-ses-juges

 

“Brésil. Scandale Petrobras: des révélations menacent le president Temer”, Courrier international, le 18 mai 2017. URL : http://www.courrierinternational.com/article/bresil-scandale-petrobras-des-revelations-menacent-le-president-temer

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