Guinée-Conakry : Dadis Camara face à la justice, Alpha Condé face aux électeurs.

Guinée-Conakry : Dadis Camara face à la justice, Alpha Condé face aux électeurs.

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Le capitaine Moussa Dadis Camara

      Dadis Camara face à la justice.

● Article de Christophe Châtelot « En Guinée, l’ex-chef de la junte Dadis Camara inculpé pour un massacre », publié le 9 juillet 2015 sur lemonde.fr

L’ancien chef de la junte militaire, le capitaine Dadis Camara a été inculpé par la justice guinéenne pour son implication dans le massacre du stade de Conakry en 2009. Dadis Camara gouverne la Guinée-Conakry de la mort de Lansana Conté (président de 1984 à 2008) en décembre 2008 jusqu’à une tentative d’assassinat qui l’écarte du pouvoir en décembre 2010 . Le court règne du « Capitaine » restera comme celui d’un dictateur qualifié par des diplomates français et américains d’«erratique, violent et imprévisible » comme le rapportent les cables Wikileaks. Dictateur fantasque, Dadis se met en scène dans les Dadis show, véritables humiliations publiques retransmises à la télévision, comme celle d’un diplomate russe ou d’un responsable guinéen. Surtout Dadis Camara restera comme celui qui était au pouvoir quand s’est produit un bain de sang, le pire massacre de l’histoire récente de la Guinée.

Le 28 septembre 2009 des militaires font irruption dans le stade de Conakry où se tient un grand meeting pacifique de l’opposition, ils y tuent 150 personnes, en blessent des centaines d’autres et violent des centaines de femmes. Six ans après, Dadis Camara fait face à plusieurs chefs d’inculpation dont de « complicité de meurtres, de viols et de disparitions forcées ».

Si la Procureure de la CPI, Fatou Bensouda, a salué le travail de la justice guinéenne, l’opposition au régime actuel pense que l’inculpation de Dadis Camara ne doit rien au hasard et que la justice est sous contrôle du président Alpha Condé. En effet, elle survient après l’annonce surprise du capitaine de se présenter aux prochaines élections présidentielles d’octobre. Ainsi tout en neutralisant un candidat à la présidence, Alpha Condé peut se présenter comme celui que a permis à ce que justice soit rendue.

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Le président Alpha Condé.

        Alpha Condé, président en campagne pour sa ré-élection.

● Alpha Condé : « Ceux qui m’empêcheront de réussir ne sont pas encore nés ». Interview fleuve du président guinéen réalisé par François Soudan et publié sur jeuneafrique.com le 19 mai 2015.

Alpha Condé répond à une série de question portant sur les litiges avec l’opposition des accusations de jouer sur les clivages ethniques à la question épineuse du calendrier électoral. A ce sujet, il se montre intransigeant en refusant d’organiser les élections municipales avant les présidentielles d’octobre.

Président en campagne, Condé défend son bilan et se présente comme un « éternel opposant » soucieux du respect des règles démocratiques. Jouant la carte de la stabilité, il sous-entend de manière à peine voilée que la continuité politique est un critère essentiel pour en finir avec l’épidémie d’Ebola. A cette question de la limitation des mandats, Alpha Condé semble partager le même état d’esprit que ses homologues du continent dont beaucoup se sont engagés dans des révisions constitutionnelles visant à prolonger leurs règnes. Le Burundi est le dernier pays africain en date où la question des « bidouillages » constitutionnels a provoqué une flambée de violence. Mais Alpha Condé, sûrement refroidi par le sort de son ancien homologue burkinabé, Blaise Compaoré, ne s’avance pas à annoncer un projet de révision de la constitution. Il « ouvre » le débat en comparant la réussite économique des pays asiatiques qui aurait été rendu possible par de systèmes politiques dictatoriaux, au retard économique des pays africains auxquels on impose des exigences démocratiques « si possible parfaites »…

Dans ce long interview le président guinéen aborde aussi ses relations avec les présidents français François Hollande et Nicolas Sarkozy, ainsi qu’avec ses homologues sénégalais Macky Sall et ivoirien Alassane Ouattara. Alpha Condé ne cesse de défendre sa légitimité en se présentant comme un président intègre, respectueux de la légalité, à la stature internationale et au-dessus des clivages ethniques et des manœuvres politiciennes. Cet exercice de communication politique est habilement mené par le résident du palais présidentiel de Sékhoutouréya.

Nicolas Sauvain

ClasseInternationale

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