Rohingyas, “les damnés de la mer”.

Rohingyas, “les damnés de la mer”.

En mai dernier dix-sept pays d’Asie-Pacifique se sont réunis à Bangkok pour tenter de trouver une solution à une crise migratoire et humanitaire d’une ampleur inattendue. Les centaines de bateaux où s’entassent des Rohingyas à destination de pays d’Asie du Sud-Est ont rappelé les tristes images des boat people vietnamiens à la fin des années 1970. Les Rohingyas, un peuple de confession musulmane dont la majorité est originaire de l’Etat de d’Arakan, ou Rhakine selon l’appellation locale, dans l’ouest de la Birmanie, sont en proie depuis des années à un véritable nettoyage ethnique passé sous silence.

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Un bateau transportant environ 300 migrants rohingyas, repéré alors qu’il dérivait dans les eaux thaïlandaises, le 14 mai. Crédits : CHRISTOPHE ARCHAMBAULT / AFP

Les Rohingyas sont devenus apatrides en 1982 par une loi introduite par le général Newin l’homme fort de la junte militaire birmane de 1962 à 1988. Cette loi considère que les peuples arrivés sur le territoire birman après 1823 ne sont pas de « vrais Birmans ». Les Rohingyas sont considérés par les Nations Unies comme « une des minorités les plus persécutées du monde ».

La Birmanie possède des frontières communes avec le Bangladesh, l’Inde, la Chine, le Laos et la Thaïlande, avec une côte ouverte sur la baie du Bengale. Peuplé de plus de cinquante-cinq millions d’individus, situé au carrefour de l’Asie du Sud-Est et du sous-continent indien, la Birmanie est l’un des pays qui affiche la plus grande diversité ethnique au monde, le gouvernement recense cent trente-cinq groupes différents. Malgré ou à cause de cette diversité, le nationalisme est fortement ancré en Birmanie, un pays qui entretient un rapport difficile avec son passé colonial. Trois guerres anglo-birmanes avaient été nécessaires au Royaume-Uni pour rattacher la Birmanie à leur Empire des Indes. C’est en 1886 que la Birmanie devient officiellement une colonie britannique.

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Source: stimson the worldfactbook 2011

L’histoire des Rohingyas.

Si le problème des Rohingyas n’est pas récent, la loi de 1982 joue un rôle crucial dans la situation actuelle. Elle a permis à cent trente-cinq ethnies birmanes de conserver la nationalité, mais les Rohingyas en ont été exclus. La justification apportée par le gouvernement repose sur une interprétation controversée du passé. Certains historiens estiment que les origines des Rohingyas remontent au XVème siècle quand les populations locales se seraient convertis au contact des commerçants et soldats arabes, mongols, turcs et bengalis. Tous sont d’accord pour affirmer qu’ils étaient présents sur le sol birman depuis des siècles bien avant 1823 contrairement à ce qu’affirme le discours officiel. De son côté le gouvernement birman avance que les Rohingyas seraient arrivés à la fin du XIXème siècle poussés à s’installer en Birmanie par les Britanniques qui selon la logique du « diviser pour mieux régner » favorisaient certaines ethnies comme les Karens chrétiens au détriment des Birmans bouddhistes. Bien que cette stratégie britannique fut une réalité elle ne permet pas pour autant d’affirmer que les Rohingyas n’étaient pas présents en Birmanie avant la colonisation.

La journaliste spécialiste des Rohingyas Sophie Ansel explique ainsi que « les bouddhistes essaient d’effacer toute trace d’une histoire commune avec les musulmans », l’islam étant pour eux une religion de guerre contrairement à la religion de paix qu’est supposée être le bouddhisme. Aussi aujourd’hui l’information est très contrôlée en Birmanie et l’idée de bouddhistes massacrant des musulmans est inconcevable pour la plupart des Birmans. Pourtant les massacres ont bien lieu et les discours de certains moines bouddhistes constituent de véritables incitations au génocide.

Aujourd’hui, on estime la population rohingya en Birmanie à 1,3 million de personnes. La question de cette minorité est avant tout un problème politique et identitaire. Qu’est-ce qu’être Birman aujourd’hui ? Pour un certain nombre, la nationalité birmane se définit par le bouddhisme. Pourtant il existe des musulmans qui ont conservé la nationalité birmane et des minorités chrétiennes birmanes. Sophie Ansel ajoute que « les Rohingyas représentent la minorité ethnique de confession musulmane la plus importante du pays. C’est sans doute pour cette raison que le gouvernement a décidé d’en faire des apatrides ». En effet, comment prouver par la suite que les Rohingyas sont sur le territoire depuis avant 1823 si leurs maisons et leurs mosquées, contenant tous leurs papiers, sont brûlées ? Notons également l’intérêt politique de ce processus, ignorer l’existence politique de plus d’un million d’individu n’est pas négligeable dans un scrutin électoral.

Le nationalisme birman se base surtout sur la religion bouddhiste. Cette fidélité à la religion traditionnelle nourrit la nostalgie d’un âge d’or brutalement interrompu par la colonisation. En 1923, la création du Conseil Législatif des Birmans a entraîné l’émergence de partis politiques pratiquement tous hostiles à l’immigration venue du sous-continent indien promue par la colonisation britannique. Par exemple le parti des Thakins « Nous les Birmans » – littéralement les « Maîtres » pour signifier qu’ils étaient les véritables maîtres de leur pays – a été fondé par Ba Sein en 1930. Si à l’époque les minorités ethniques étaient facilement assimilées au sein de la culture birmane, elles font aujourd’hui l’objet d’un rejet violent. L’année 1942 marque un tournant dans l’histoire birmane avec l’invasion du pays par les Japonais. Comme en Indochine et en Indonésie l’occupation japonaise a favorisé le développement des mouvements nationalistes. Se présentant comme le libérateur asiatique face au colon européen, les Japonais soutiennent d’abord les nationalistes locaux avant que leurs revendications n’échappent à leur contrôle. En 1948, la Birmanie devient indépendante du Royaume-Uni et refuse de rejoindre le Commonwealth. A peine indépendante la situation politique devient très instable après l’assassinat du père de l’indépendance le général Aung San, le père d’Aung San Suu Kyi. En cette période de construction identitaire d’un nouvel État véritable mosaïque ethnique, les Rohingyas sont exclus du récit national. La situation se dégrade particulièrement avec le durcissement de la dictature militaire et l’arrivée au pouvoir de Ne Win. « Une ère d’obscurantisme et de totalitarisme s’est abattue sur le pays avec le coup d’Etat du général Ne Win [en 1962]  », explique la journaliste Sophie Ansel. Celui-ci « a imposé le bouddhisme comme religion d’État dans ce pays où cohabitent plusieurs confessions. Il a aussi lancé une propagande raciste dans les écoles et médias avant de mener des opérations de purification visant à débarrasser le pays des “étrangers” ». Les campagnes de 1978 et 1992 ont conduit à la fuite d’environ deux cent mille Rohingyas au Bangladesh.

Les Rohingyas depuis les années 2000

Ces quelques 1,3 millions d’individus sont non seulement sans nationalité, mais ils sont également dépossédés de leurs droits élémentaires. En plus d’être entassés dans de véritables ghettos, ils n’ont pas accès aux écoles, aux hôpitaux, au marché du travail… Tomás Ojea Quintana, le rapporteur spécial des Nations Unies pour les Droits de l’Homme en Birmanie de 2008 à 2012 a même parlé de « crime contre l’humanité ».

Les persécutions contre ce peuple se sont accentuées avec le renforcement d’un courant nationaliste bouddhiste, notamment le mouvement islamophobe “969”, mené par le bonze Ashin Wirathu. Ce dernier faisait d’ailleurs la une du Time Magazine avec en gros titre « The Face of Buddhist terror » et le surnom de “Ben Laden bouddhiste”. Ce moine milite pour une loi dite de “protection de la race et de la religion” et rêve d’interdire les mariages mixtes entre musulmans et bouddhistes. « Commercez seulement avec ceux de votre espèce, ceux de votre même race et même foi » tel est son credo. Il s’agirait selon lui de protéger l’identité birmane bouddhiste menacée par la population musulmane, qui représente pourtant à peine 5% de la population du pays.

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La Une du Time Magazine consacrée à Ashin Wirathu.

Ashin Wirathu s’est engagé en 2001 dans le Mouvement 969, en 2003 il est condamné à 25 ans de prison pour ses idées et a bénéficié en 2010 de l’amnistie nationale dans le cadre du processus de « civilianisation » de la junte militaire. Depuis les réformes de 2011 comme l’assouplissant de l’accès à Internet et l’explosion du marché des téléphones portables, Ashin Wirathu est devenu particulièrement actif sur YouTube et sur les réseaux sociaux.

Le nombre 969 fait référence à l’idéologie exposée dans un livre de U Kyaw Lwin à la fin des années 1990. Ce fonctionnaire du Ministère des Affaires religieuses fait référence à une croyance traditionnelle issue de la numérologie. Chez les musulmans d’Asie du Sud l’expression « Au nom de Dieu clément et miséricordieux » est représentée par le nombre 786. Ce nombre sert aussi à identifier une entreprise tenue par des musulmans. Les adeptes du 969 y voient la preuve d’un complot musulman pour conquérir la Birmanie au XXIème siècle, puisque 7 plus 8 font 21 (notre siècle). Le nombre 969 serait l’opposé cosmologique de 786, et représente les « Trois Joyaux » : les neuf attributs du Bouddha, les six attributs de ses enseignements et les neuf attributs du Sangha, la communauté des fidèles bouddhistes. C’est là un véritable paradoxe puisque les Trois Joyaux sont aussi exposés sous la forme « Apprendre, comprendre et partager », comme le corrélatif des « Trois Poisons » : l’ignorance, la haine et l’avidité…

Le 28 mai 2012 trois Rohingyas ont été accusés d’avoir violé et tué une jeune femme bouddhiste, ce qui a entraîné de violents affrontements intercommunautaires. Soixante-dix Rohingyas ont été massacrés en une journée dont vingt-huit enfants. Deux des accusés ont été condamnés à mort le 19 juin et le troisième s’est suicidé en prison. Les affrontements se sont poursuivis et ont dépassé les frontières de l’État de Rhakine.

Le président birman Thein Sein élu en 2011 a alors précisé que la « seule solution » pour que les violences cessent envers les Rohingyas était de les envoyer dans des camps ou dans d’autres pays. Il avait même demandé aux Nations Unies de l’aider pour ce projet de déportation, l’ONU a naturellement refusé. Conséquence de ces violences, quelques 32 000 Rohingyas se sont réfugiés au Bangladesh dans des camps proches de la frontière. De véritables ghettos se sont formés en Birmanie et certains ont décrit la situation comme un « apartheid légal ». Human Rights Watch dénonce les pratiques inhumaines comme les stérilisations forcées, les refus de soins, les destructions de villages, l’installation dans des camps, l’esclavage, les tortures sexuelles et les viols commis par des militaires. En mai 2015 le président a signé une loi sur le contrôle des naissances spécifique pour les Rohingyas.

L’année 2015, une crise sans précédent.

L’ampleur de la crise actuelle s’est révélée début mai 2015 lorsque les autorités thaïlandaises ont découvert des camps de migrants et des charniers dans la jungle. Plus de 150 tombes et fosses communes ont été retrouvées aux environs de camps abandonnés. Il y aurait 2,5 millions de Birmans en Thaïlande dont de nombreux illégaux. Depuis le coup d’ État militaire de mai 2014 en Thaïlande les contrôles sont plus stricts. Bangkok a décidé de sévir plus durement contre la traite et de combattre les filières de trafiquants. Si la Thaïlande a procuré de la nourriture et de l’eau, les Rohingyas y sont souvent exploités, rackettés voire assassinés par les trafiquants.

Les passeurs des nombreux « bateaux d’esclaves », véritables prisons flottantes, décident d’abandonner en mer ces milliers de migrants, en majorité des Rohingyas, les condamnant à mourir de faim ou de maladie. Certains arrivent tout de même sur terre. Le célèbre photoreporter américain James Nachtwey a réussi à photographier des migrants en ligne, après avoir passé trois mois en mer, presque morts de faim et forcés de boire leur propre urine. Ils étaient un par un recensés par un Indonésien qui documentait leur nom, leur âge et leur adresse sur un tableau blanc.

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James Nachtwey for TIME

En novembre 2014, ils étaient 1400 débarqués en Indonésie, un millier en Malaisie. En mai 2015 les flux de migrants ont terriblement augmenté et aucun pays riverain ne s’est préparé à accueillir cet afflux.

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Source : BBC

Les migrants rêvent de débarquer en Malaisie ou en Indonésie, des pays à majorité musulmane, à la recherche de meilleures conditions de vie. Si certains ont réussi à parvenir jusqu’en Indonésie, comme les réfugiés chaleureusement accueillis dans la province indonésienne d’Aceh à la pointe nord de l’île de Sumatra, d’autres sont confrontés à des discriminations même en dehors de la Birmanie comme au Bangladesh. Des fosses communes ont été découvertes également en Malaisie, sans soulever l’indignation.

De leur côté, la Malaisie et l’Indonésie ont fait leur possible mais les deux pays réclament une aide de la part de la communauté internationale surtout une assistance financière. En effet il faudrait créer des infrastructures et fournir des provisions en quantité. Mais surtout il s’agit de trouver une solution permanente pour ces réfugiés. Fin mai 2015, la Malaisie avait déjà accueilli 45 000 Rohingyas et Kuala Lumpur affirme ne pas pouvoir en accueillir davantage. A long terme la seule solution serait évidemment un changement profond en Birmanie.

Quelles réponses co-organisées en Asie-Pacifique ?

Le 20 mai 2015 s’est tenu un sommet entre les ministres des affaires étrangères de l’Indonésie, de la Thaïlande et de la Malaisie. La Birmanie n’a cependant pas envoyé de représentant malgré sa place centrale dans la crise. Jeudi 21 mai, un ministre malaisien a exigé de son coté que l’Association des nations du de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) envoie un « message fort » à la Birmanie pour qu’elle cesse sa politique d’oppression envers la minorité, mais cet appel a bien des chances de rester lettre morte.

Le Sommet de Bangkok à la fin mai a donné lieu à une prise de conscience. L’ONU s’est investie dans la crise à travers l’administration du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, le HCR. Ce programme permet notamment aux camps d’être financés et entretenus en Indonésie. Malgré ces efforts, certains pays continuent ce jeu macabre de « ping pong humain » de rejet des Rohingyas d’un pays à l’autre. Au Bangladesh où la population Rohingya présente sur le territoire est estimée entre 7000 et 30 000 individus, la réponse du gouvernement consiste à déplacer les réfugiés depuis les camps à la frontière birmane vers l’île d’Hatiya plus au sud du pays.

Fin 2014, le Conseil de sécurité des Nations Unies a adopté une résolution exigeant que la Birmanie accorde la nationalité aux Rohingyas. Le Secrétaire général des Nations Unies Ban Ki Moon a rappelé aux dirigeants d’Asie du Sud-Est leur obligation de respecter le droit international et l’obligation du secours à la mer.

Quelle réaction de la communauté internationale ?

Le relatif désintérêt des pays étrangers et de l’ASEAN pour la condition des Rohingyas s’explique par le processus de réintégration de la Birmanie dans la communauté internationale et les perspectives économiques qu’offrent des relations normalisées avec ce pays. Depuis 2011, la Birmanie est entrée dans une période de transition – avec notamment la libération d’Aung San Suu Kyi, l’autorisation de son parti, la Ligue nationale pour la démocratie, et la libération de quelques prisonniers politiques. Certains ont parlé de « printemps birman » sûrement de manière prématurée. En 2012, le pays a normalisé ses relations avec la communauté internationale. L’Union européenne et les États-Unis ont levé leurs sanctions mises en place en 1986 et ont autorisé les investissements financiers. L’appétit pour la Birmanie se comprend par la richesse de ses sols et sous-sols, la Birmanie possède du gaz, du pétrole, du bois, des pierres précieuses et un fort potentiel hydraulique. Aussi, les enjeux géopolitiques et économiques sont évidents pour ce pays qui tente de jouer sa carte entre deux géants en pleine croissance, l’Inde et la Chine.

En fait, l’Union européenne et les États-Unis se sont contentés de l’annonce de réformes du gouvernement et d’une prétendue démocratisation du pays pour lever les sanctions. En mai 2013, Barack Obama et François Hollande ont rencontré Thein Sein et la question des Rohingyas a été évoquée même si le président birman a demandé à ce qu’elle ne le soit pas. Pour les États-Unis la majeure partie du problème repose sur la Birmanie. Bien que confronté à une crise humanitaire semblable qui se déroule à ses portes, l’Union européenne tente d’aider ses voisins asiatiques. Depuis 2010, 80 millions d’euros ont été déboursés pour aider les réfugiés de cette zone. Malgré ces déclarations et ses aides substantielles, il semble bien que in fine les préoccupations économiques priment sur les droits de l’homme.

En Birmanie, où les choses ne sont « pas simples » pour Aung San Suu Kyi

En cette année électorale cruciale la question des Rohingyas ne fait pas la Une. Bien qe le parti d’Aung San Suu Kyi opposante historique au régime militaire et prix Nobel de la paix en 1991, la Ligue nationale pour la démocratie ait déclaré que « ce sont des êtres humains » et que l’« on ne peut pas juste les envoyer en mer. Ils ont aussi des droits. » avant d’ajouter que le pays « devait accepter la minorité », son chef ne s’est toujours pas publiquement prononcée sur le sujet.

Le Dalaï-lama a appelé la chef de l’opposition birmane à se prononcer sur ce problème d’envergure. Pour de nombreux observateurs, ce mutisme dérangeant s’explique par le contexte électoral. En effet, les élections législatives auront lieu en novembre 2015 et la société birmane est traversée par un courant nationaliste et antimusulman d’une ampleur toujours plus inquiétante. « J’espère qu’Aung San Suu Kyi, en tant que prix Nobel, pourra faire quelque chose » a déclaré le Dalaï-lama dans The Australian le 28 mai dernier. Les deux leaders se seraient vus deux fois à Londres puis en République Tchèque où elle aurait alors affirmé au chef spirituel bouddhiste que « les choses ne sont pas simples ».

Tibetan spiritual leader the Dalai Lama and Myanmar opposition leader Aung San Suu Kyi pose for a photo during their meeting in Prague, Czech Republic, on 15 September 2013.
Le Dalaï Lama et Aung San Suu Kyi à Prague le 15 septembre 2013. Crédit photo : File photo/OHHDL/Jeremy Russell

En attendant, face à ce mutisme stratégique, on peut se souvenir que cette grande combattante lors de son discours pour le prix Nobel en 1991 affirmait que « ce n’est pas le pouvoir qui corrompt mais la peur. La peur de perdre le pouvoir corrompt ceux qui l’exercent et la peur de la matraque du pouvoir corrompt ceux qui le subissent (…) ». Où en est exactement celle pour qui « la révolution par excellence est celle de l’esprit, issue de la conviction intellectuelle qu’il est indispensable de changer les attitudes mentales et les valeurs qui façonnent le cours du développement d’une nation » ? La femme pour qui « il ne suffit pas de réclamer la liberté, la démocratie et les droits de l’homme. Il faut qu’il y ait unité et détermination afin de persévérer dans la lutte, de consentir à des sacrifices au nom de vérités immuables, de résister aux influences corruptrices qu’exercent le désir, la rancune, l’ignorance et la peur » ?

 Le silence d’Aung San Suu Kyi est fortement critiqué. Elle cherche sûrement une position équilibrée en pariant sur la transition actuelle et ne souhaite pas froisser les militaires ni se mettre à dos une population islamophobe. Ce serait alors la garantie pour elle d’accéder à un poste de responsabilité politique plus important que simple députée…

Comme le rappelle le Japan Times, « les élections ne définissent pas la démocratie. L’état de droit et le traitement juste et égal de tous les citoyens en sont aussi des éléments essentiels. » Il faudra sans doute attendre les élections de novembre 2015 pour espérer voir la situation basculer d’elle-même en Birmanie.

Léo Rivaud

ClasseInternationale

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