Bilan du monde en 2017

Bilan du monde en 2017

 

Une année encore commence, une année où nous efforcerons d’analyser l’actualité internationale dans sa complexité. Pour mieux comprendre les évènements de 2018, nous vous proposons ce bilan de l’actualité dans le monde en 2017 par zone géographique.

ASIE – PACIFIQUE

asie

Avec le Nouvel An lunaire, l’Asie a fêté 2017 sous le symbole du coq, animal plein de surprises selon la tradition asiatique, souvent associé au « feu » par les géomanciens, et qui laisse présager des temps mouvementés. Incontestablement, l’année 2017 a répondu à ces promesses de mouvement : la région est devenue un espace incontournable des relations internationales.

Après « l’année noire de 2016 » connue par la Chine sur le plan économique, le pays semble reprendre le chemin de la croissance, comme l’a annoncé le Bureau national des statistiques ce jeudi 18 janvier 2018. La croissance pour l’année 2017 s’est élevée à 6,9%, un niveau supérieur aux espérances de Pékin qui s’était fixé pour objectif 6,5% de croissance. Pour la première fois depuis 2010, le taux de croissance est en augmentation. La confiance des entrepreneurs chinois et des investisseurs étrangers semble stimulée par les annonces faites par le président Xi Jinping, qui a renforcé sa position de leader du pays suite au XIXe Congrès du Parti communiste chinois

Reconduction de Xi Jinping : la Chine entre faiblesses et grandeur

Les 2 300 délégués du PCC ont même voté un amendement pour inscrire dans la Charte du Parti «la pensée de Xi sur le socialisme aux caractéristiques chinoises pour une nouvelle ère ». En effet, nous vous rappelions que la Chine souhaitait affirmer sa position régionale mais également internationale en finançant les Nouvelles routes de la soie. Cet équilibre entre stabilité régionale et affirmation de la puissance est au cœur de la politique étrangère chinoise (voir à ce sujet les travaux du directeur de recherche au CNRS et sinologue français Jean-Pierre Cabestan, dont nous avions évoqué quelques axes ici .

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La question nord-coréenne

L’année 2017 aura également été marquée par la résurgence des tensions liées à la question nord-coréenne. Les multiples essais nucléaires menés par le régime de Pyongyang ont une fois encore alarmé les puissances asiatiques voisines, comme le Japon, la Chine, mais surtout la Corée du Sud. La Corée du Nord a officiellement annoncé avoir réalisé le 3 septembre 2017 un essai d’une bombe thermonucléaire, dont la puissance a provoqué une secousse sismique de l’ordre de 6,4 sur l’échelle de Richter au nord de la frontière séparant les deux Corées. Le président américain Donald Trump, qui a fait de la dénucléarisation du régime nord-coréen une priorité de son début de mandat, a attisé les craintes en menaçant de « détruire totalement » la Corée du Nord si cette dernière continuait de menacer les États-Unis et leurs alliés. On voit ainsi que la crise nord-coréenne constitue une pierre dans le jardin de la politique de désarmement dans la zone.

La Chine semble à son tour agacée par l’attitude de son voisin, et n’a pas hésité à voter avec les États-Unis au Conseil de Sécurité des Nations Unies l’adoption de la résolution 2375 sanctionnant le régime de Pyongyang. Un froid s’est infiltré dans les relations entre les deux « pays frères », et l’année à venir devrait apporter son lot de surprises quant à la survie de l’amitié sino-nord-coréenne. Si cette question nord-coréenne constitue un enjeu de sécurité internationale et peut représenter une « menace contre la paix » comme le réaffirme régulièrement l’Organisation des Nations Unies (en se référant à l’article 39 de la Charte), l’escalade de violence entre le dirigeant américain et le leader nord-coréen ne cesse d’accentuer la crainte d’un conflit nucléaire. Bien que celui-ci soit peu probable, l’hypothèse ne peut être exclue. Cela est d’autant plus vrai que la Chine souhaite avoir les mains libres pour devenir le leader de la région asiatique, et ne souhaite pas que le conflit nord-coréen fasse obstacle à ses ambitions régionales et internationales.

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Japon

Tandis que la population du Japon continue de décliner inexorablement – notamment à cause d’un vieillissement accéléré de la population où les plus de 65 ans représentent 27,2 % de celle-ci en 2017, un record mondial – le pays conserve sa place de troisième puissance économique mondiale (en Produit Intérieur Brut) selon un classement du Centre for Economics and Business Research (CEBR) publié le 26 décembre dernier. Sa puissance économique s’appuie sur des bases industrielles solides – l’industrie lourde reste encore puissante, elle se concentre surtout dans le domaine de la sidérurgie, qui pour rester concurrentiel réalise une montée en gamme sur des aciers de très haute qualité. Malgré cet indicateur économique positif qui aurait dû renforcer la position du Premier ministre Shinzo Abe, porté au pouvoir en 2012 sur la promesse d’une sortie japonaise de la déflation, celui-ci a été décrédibilisé durant la deuxième partie de l’année, fragilisant considérablement sa position pour les élections fin 2018. En effet, Shinzo Abe est dans la tourmente  suite à deux affaires en particulier. Premièrement, M. Abe est soupçonné d’avoir favorisé Moritomo Gakuen, une institution connue pour ses positions nationalistes, dans la construction d’une école primaire. Deuxièmement, en matière de politique étrangère, les activités de maintien de la paix au Sud Soudan ont conduit à la démission de la ministre de la Défense, Tomomi Inada, en juillet, suite à des révélations sur les violences des combats alors même que les soldats japonais sont soumis à des restrictions qui imposent la renonciation à la guerre. Afin de retrouver sa légitimité, Shinzo Abe a décidé le 25 septembre 2017 de dissoudre le Parlement et de convoquer de nouvelles élections et asseoir sa légitimité. Après avoir timidement remanié son gouvernement, la victoire relative du Premier ministre pourrait à terme conduire à un changement de dirigeant et à l’accroissement des incertitudes quant aux politiques économiques, budgétaires, sociales, culturelles, d’investissement et de défense, à la veille des Jeux Olympiques de Tokyo de 2020.

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Birmanie

L’année 2017 en Birmanie a été synonyme de violences suite aux exactions de l’armée au mois d’août qui ont ciblé les Rohingyas, ethnie musulmane minoritaire en Birmanie. Les violences à l’encontre de cette population se sont exacerbées en août 2017, donnant lieu à des vagues de migrations Rohingyas vers les pays limitrophes. La communauté internationale a insisté sur le caractère préoccupant de ces violences, qui ont causé la fuite en masse des Rohingyas vers le Bangladesh notamment. A la demande du Royaume-Uni et de la Suède, le Conseil de Sécurité de l’ONU a réclamé au gouvernement birman le 13 septembre de faire cesser cette « violence excessive », réclamation réitérée par les dirigeants des pays à majorité musulmane dont le Bangladesh, l’Indonésie, la Turquie et le Pakistan. Le Haut-commissaire aux droits humains, Zeid Ra’ad Al Hussein, a qualifié lundi 11 septembre cette répression exercée par le régime birman envers les Rohingyas d’« exemple classique de nettoyage ethnique ». L’icône de la démocratie birmane Aung San Suu Kyi (qui avait reçu le prix Nobel de la paix en 1991), devenue l’actuelle chef de gouvernement en Birmanie, est très vivement critiquée pour son inaction. Cependant en janvier 2018 la reconnaissance de l’implication de l’armée birmane fut un « pas positif » selon Aung San Suu Kyi. Le Bangladesh et la Birmanie ont passé un accord  le 16 janvier 2018 permettant le retour des 655 000 musulmans ayant fui les massacres ; une décision très controversée par les Rohingyas eux-mêmes qui ont manifesté le 19 janvier 2018 et ont notamment demandé la citoyenneté birmane, ainsi que des garanties de sécurité avant d’envisager un retour dans l’Ouest de la Birmanie.

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Intégration Régionale en Asie du Sud-Est

L’intégration régionale est fragile en Asie du Sud – Afghanistan, Bangladesh, Bhoutan, Inde, Maldives, Népal, Pakistan et Sri Lanka – car elle est traversée par de nombreuses tensions aussi bien économiques, politiques que migratoires.  L’intégration régionale en Asie du Sud Est est-elle la solution pour l’Asie du Sud ? Rien n’est moins sûr.  Le faible degré d’intégration économique en témoigne, même si les axes de coopération technique sont en plein développement et seront de plus en plus nécessaires pour favoriser un rapprochement entre les pays de la zone.  Malgré la vitalité des alliances régionales, les obstacles sont nombreux. Tout d’abord le poids de l’Inde dans cette région effraie la Chine, qui voit en son voisin un rival à sa politique d’influence en Asie, même si Pékin tente de limiter son rayonnement en s’appuyant traditionnellement sur le Pakistan mais aussi le Sri Lanka et le Bangladesh. Entre ce dernier et l’Inde, un mur de 3046 kilomètres est déjà réalisé depuis 2013. Par ailleurs, le projet des Nouvelles routes de la soie relancé par la Chine prend soin d’écarter son voisin indien de l’intégration, notamment par l’intermédiaire de voies de communication passant par les alliés régionaux de Pékin. Enfin, la rivalité indo-pakistanaise affaiblit également considérablement l’intégration régionale. L’avenir de celle-ci semble plus actif à l’Est comme le montre le dynamisme d’associations à l’instar de l’Initiative de la Baie du Bengale ou encore le Projet de Coopération du Grand Mékong qui comprennent des pays d’Asie du Sud et d’Asie du Sud-Est.

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Le terrorisme dans la zone Afghanistan-Pakistan

En Afghanistan et au Pakistan, les attentats se multiplient à l’encontre des chiites. Revendiquées la plupart du temps par l’Etat Islamique, ces attaques ravivent les tensions entre les différentes communautés religieuses et mobilisent les pays membres du Conseil de Sécurité des Nations Unies dans la lutte contre le terrorisme. De nombreux attentats ont été perpétrés en 2017, dont un qui fit une quarantaine de morts dans un centre culturel de Kaboul le 18 décembre. Le retrait des troupes américaines en Afghanistan a été exclu par Donald Trump, et l’aide financière américaine au Pakistan suspendue – le président américain reprochant au pays ses liens avec les talibans.

Source : Emission Le dessous des cartes de décembre 2008: Le Waziristan, enjeu global. ARTE.

La zone Af-Pak – et plus particulièrement l’ensemble des régions tribales du Waziristan – est le théâtre d’affrontements entre l’armée pakistanaise envoyée pour défendre la frontière et les talibans afghans, qui n’hésitent pas à commettre des attentats touchant également les populations civiles. Même les ONG, qui dénoncent la situation humanitaire sur place, semblent éprouver des difficultés à venir en aide aux locaux. Nous nous interrogions sur le rôle global pouvant être joué par les ONG dans ce type de conflit et sur leur légitimité dans cet article.


MOYEN-ORIENT

MO

Syrie: l’Etat islamique est en déroute, mais qui gagnera la paix ?

La Syrie est évidemment au cœur de l’actualité du Moyen-Orient en 2017. Différentes phases de progression de plusieurs groupes ont marqué l’année. Il faut tout d’abord noter la défaite tactique de l’Etat Islamique (EI). Battus également en Irak, les djihadistes de l’EI ont perdu la majeure partie de  leurs bases stratégiques, à commencer par leur capitale en Syrie, Raqqa, libérée à l’automne 2017 après quatre ans d’occupation. L’EI a également dû abandonner la ville de Palmyre, où la cruauté de l’organisation envers les civils et la destruction du patrimoine historique ancestral avaient achevé de convaincre l’Occident de la nécessité absolue d’agir. En 2016, Classe Internationale avait tenté de décrypter un conflit déjà sans fin, dont le compte-rendu témoignait de l’extrême complexité et annonçait une résolution dans la douleur à la guerre civile.

Deux grandes coalitions ont participé à la chute de l’Etat Islamique, l’une soutenue par les Etats-Unis et leurs alliés, dont la France, en appui notamment les forces kurdes syriennes, irakiennes et turques ; ainsi que différents groupes rebelles comme l’Armée syrienne libre. Cette coalition a enregistré de nombreuses victoires, et notamment la prise de Raqqa. De l’autre côté, la coalition Russie – Iran – Syrie, appuyée entre autres par le Hezbollah libanais, a également contribué à cette défaite, tout en combattant d’autres groupes rebelles opposés au régime. Cette coalition a notamment repris les villes de Palmyre et surtout d’Alep, infligeant une défaite sévère aux groupes rebelles, affaiblis par leurs divisions et par ce que certains observateurs considèrent comme un abandon de la communauté internationale. Néanmoins, si l’Etat Islamique a été chassé de la plupart de ses positions stratégiques en Syrie, le groupe semble bien se reterritorialiser ailleurs, et notamment en Libye, où il profite du chaos de la Guerre civile entamée en 2011.

L’Iran s’est notamment démarquée en 2017, au point d’apparaître comme un acteur majeur du conflit. Engagée de longue date dans un système d’Alliance noué avec la Russie et le régime Syrien, la République Islamique a intensifié en 2017 son engagement aux côtés de Bachar el Assad, pour l’aider à s’imposer comme le grand vainqueur syrien de la Guerre. D’abord en armant les troupes loyalistes, notamment en engins explosifs. Également en conseillant techniquement l’État-major syrien sur le terrain : quelques pasdarans (troupes d’élite iraniennes) étaient déjà déployés en 2015 aux côtés des armées russes et syriennes, selon Le Monde. Enfin, et ce point compte, l’Iran a activé son levier libanais, le Hezbollah, parti chiite qui lui est dévoué, dès les prémices du conflit. Mais c’est en 2017 que ce groupe armé a joué son rôle le plus important, appuyant les troupes syriennes pour reprendre des points stratégiques détenus par l’Etat Islamique, comme la ville de Palmyre. Présente également sur le théâtre irakien, notamment à la frontière commune des deux pays, la République Islamique entend développer un axe d’influence reliant l’Irak au Liban qui lui permettrait de s’imposer comme une puissance majeure au Moyen-Orient à l’issue du conflit.

La guerre en Syrie entrera probablement dans une nouvelle phase en 2018. La déroute de l’EI d’une part, et de nombreux groupes rebelles d’autre part, bouscule l’équilibre des forces en présence en faveur du régime de Bachar el Assad. Ce conflit de plus de sept ans, au bilan humain, matériel et moral extrêmement lourd, est définitivement un symbole de l’échec de la communauté internationale à protéger les civils. Y compris de menaces que l’on croyait oubliées, comme celle des armes chimiques. Qui gagnera la paix, alors que la fin de la guerre approche ? Les Occidentaux, trop lents à agir au début du conflit, sont bien obligés d’admettre que Bachar Al Assad s’est maintenu au pouvoir. Le président Macron, qui apparaît comme un leader du groupe occidental sur le dossier syrien, a répété sa volonté d’inclure Bachar el-Assad dans les négociations, arguant qu’il n’existe pas d’autre alternative efficace. La Russie, l’Iran et le clan de Bachar ont montré leur cohésion et leur détermination à mener à bien une stratégie qui servira leur intérêt, quitte à manquer aux règles internationales les plus fondamentales, comme celles concernant la cruauté des armes employées ou encore le traitement des prisonniers de guerre – ces accusations concernent essentiellement l’armée loyaliste syrienne. Le bilan humain de la guerre, encore très incertain, s’élève probablement à plus de 500 000 morts. Le monde se souviendra de ce cataclysme.

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En Irak, Mossoul libérée, le Kurdistan irakien en sursis

L’Irak était un autre Etat amputé d’une partie de son territoire par l’Etat Islamique, qui y avait lancé ses activités dès 2006 et qui a profité du conflit syrien pour prendre appui dans l’ensemble de la région. En juillet 2017, la seconde ville du pays, Mossoul, tombée en 2013 aux mains de l’Etat Islamique, a été libérée par différents partis, notamment kurdes irakiens et troupes irakiennes. Le 9 décembre, les troupes irakiennes parviennent à la frontière syrienne. Le Premier ministre irakien Haider al-Abadi, déclare que la guerre est terminée, mais le bilan humain est lourd en Irak et la région est déstabilisée pour longtemps. Au Nord-Est du pays, la région autonome du Kurdistan irakien a proclamé son indépendance par référendum populaire le 25 septembre, dans un contexte national et régional d’une grande complexité, comme nous analysions à l’époque dans notre article sur le sujet. Des tensions ont éclaté néanmoins entre les différents partis kurdes et surtout, le gouvernement de Kaboul a dénoncé la proclamation d’indépendance. Un conflit armé a éclaté alors et le Kurdistan irakien s’est trouvé dépecé par l’avancée des troupes irakiennes à l’automne, qui le privent notamment du territoire stratégique de la région de Kirkouk, très riche en pétrole. Le gouvernement d’Erbil, la capitale du Kurdistan autoproclamé, dont le président a démissionné en octobre, entend désormais s’appuyer sur le soutien de l’Iran pour continuer d’exister. L’année 2018 sera probablement déterminante pour ce nouvel Etat qui incarne, comme ailleurs dans la région, le rêve brisé de l’indépendance kurde.

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Au Yémen, la guerre oubliée de l’Arabie Saoudite contre les Houthistes chiites

L’équipe de Classe Internationale s’est attelée à ce sujet dans un article publié au début de l’année 2017. Le Yémen est le symbole de la nouvelle ligne dure de la politique étrangère saoudienne. Le prince héritier Ben Salman, nouvel homme fort du régime, a durci les bombardements contre les Houthistes, un groupe rebelle chiite soutenu par l’Iran et menant une guerre civile au Yémen depuis 2014, après le départ de l’ancien président Saleh, suite à la révolution yéménite de 2012. L’ex-président Saleh, qui tentait de régner sur le pays avec ses alliés houthistes suite à l’exil du président Hadi, a été tué par ses anciens alliés le 4 décembre 2017. La guerre au Yémen, menée par un allié occidental au Moyen-Orient, l’Arabie Saoudite, entame un peu plus l’espoir d’une stabilité politique à court terme au Moyen-Orient et la légitimité de la communauté internationale, qui laisse des populations civiles mourir sous les bombes saoudiennes dans le silence de l’Occident.

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En Israël, quelle conséquence à la décision de Trump de déplacer son ambassade à Jérusalem ?

Le Président américain Donald Trump en avait fait une promesse de campagne. Le 6 décembre, il a officiellement reconnu Jérusalem comme capitale de l’Etat d’Israël et a annoncé vouloir y installer la nouvelle ambassade américaine avant la fin de l’année 2019. Cette décision, condamnée sans relâche par une grande partie de la communauté internationale, marque une politique américaine maladroite concernant le conflit israélo-palestinien. En mai dernier, le débat que nous avions organisé et retranscrit témoignait d’un dialogue israélo-palestinien en sursis, miné de l’intérieur par des blocages anciens. Donald Trump, probablement parce qu’il juge que c’est par manque de courage que ses prédécesseurs n’avaient pas pris cette décision, a dessiné par son geste une politique américaine privilégiant à n’importe quel prix une solution à un seul Etat du conflit, négligeant les espérances palestiniennes et le consensus international au sujet de la ville de Jérusalem. Cette perspective de déménagement était en effet actée par le Congrès américain depuis 1995, qui avait voté à l’époque le Jerusalem Embassy Act. Tous les prédécesseurs de Donald Trump ont néanmoins fait usage de leur droit de report d’application de cette décision. Loin de faire avancer la question, le président américain s’est attiré les foudres des pays arabes, entamant un peu plus sa légitimité au Moyen-Orient.

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En Turquie, Erdogan resserre l’étau autour de la société civile

L’année 2017 a marqué le virage autoritaire du président Recep Tayyip Erdogan, bien que cette tendance avait déjà été amorcée précédemment. L’homme fort du régime a d’abord été condamné de plus en plus fermement par la communauté internationale pour avoir favorisé l’instabilité du théâtre syrien en facilitant la libre circulation des djihadistes à sa frontière. S’appuyant sur la tentative de coup d’Etat fomentée par une partie de l’armée à l’été 2016, le président Erdogan a engagé une purge de l’administration, de l’armée et de l’ensemble de la société civile. Ancien allié privilégié de l’Occident au Moyen-Orient, la Turquie s’est éloignée un peu plus du chemin de la démocratie en 2017, rendant notamment improbable la candidature turque à l’entrée dans l’Union Européenne, qui faisait déjà face de longue date à l’opposition de nombreux acteurs européens, dont l’Allemagne d’Angela Merkel. Plus généralement, le pays s’est écarté de son ancienne politique pro-occidentale, se dirigeant vers une position plus ambiguë dans laquelle le président, consolidant sa base nationale par un discours ultra-nationaliste et proche de l’Islam radical, flirte avec différents acteurs antagonistes. De plus, le président Erdogan incarne une idéologie nouvelle, le néo-ottomanisme, sur laquelle se structure la dérive autoritaire du régime – nous revenions (en anglais) sur ce phénomène en octobre dernier.


AFRIQUE

afrique

2017 a été très riche pour l’Afrique sur le plan politique. Elle a marqué une année de transition, de tournant pour certains Etats, d’immobilisme pour d’autres, une année d’ouverture et de projets pour pour un avenir durable à l’échelle continentale.

Une année fatale pour les “vieux” chefs d’Etat Africains

Comme le souligne RFI Afrique, « 2017 a été fatale à un certain nombre de chefs d’Etats à la tête de leurs pays depuis des décennies ».

Après 22 ans de présidence, le chef de l’Etat gambien, Yahya Jammeh, s’est incliné face au seul candidat de l’opposition aux élections organisées fin 2016. Si le président sortant a reconnu dans un premier temps sa défaite, il a ensuite tenté de s’accrocher au pouvoir, dénonçant des irrégularités de scrutin. La société civile, la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest ainsi que les Nations Unies ont fermement dénoncé  dénoncent fermement cette atteinte à la démocratie : Jammeh est contraint à l’exil dès le début de l’année 2017.

En Angola, c’est après 28 ans de pouvoir qu’Eduardo Dos Santos transmet le pouvoir à son successeur désigné, Joao Lourenço, qui remporte la présidentielle en août 2017. Le président sortant, visiblement mieux organisé que son homologue gambien, quitte son office avec la garantie d’une retraite royale, une immunité totale et conserve la présidence du parti au pouvoir.

Si le président Dos Santos s’offre un départ royal, son voisin Robert Mugabe au Zimbabwe n’a pas su si bien tirer son épingle du jeu. Alors que rien ne laissait présager l’ébranlement de son règne, le président de 93 ans décide de limoger son vice-président et successeur désigné Emmerson Mnangawa, ouvrant les portes de la succession et du pouvoir à son épouse, Grace Mugabe. Les luttes au sein de  L’Union nationale africaine du Zimbabwe – Front Patriotique (Zanu PF), au pouvoir depuis l’indépendance, auront raison du président qui est destitué par son propre parti, appuyé par l’armée, le 21 novembre 2017.

D’autres dirigeants africains renforcent au contraire emprise sur des pays comme le Rwanda, qui réélisait à plus de 98% des voix son chef d’Etat sortant, Paul Kagame, à  la tête du pays depuis 23 ans, le 5 août 2017. Le Monde Afrique souligne le caractère « sans surprise » de cette élection : « il n’y a pas d’élections au Rwanda, juste un couronnement ».

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Un tournant pour l’ANC et la Nation arc-en-ciel

Autre rendez-vous important cette année en Afrique du Sud, le Congrès National Africain (ANC), parti de Nelson Mandela dominant la vie politique depuis 1994, s’est réuni le 16 décembre 2017 pour organiser la succession de Jacob Zuma. Le face-à-face entre le vice président Cyril Ramaphosa et l’ex-épouse du chef d’Etat, Nkosazana Dlamini Zuma, s’est soldé par la victoire de Cyril Ramaphosa, désormais en bonne position pour la présidentielle de 2019.

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Le sommet UA-UE « Investir dans la jeunesse pour un avenir durable »

A Abidjan les 29 et 30 novembre, le sommet Union africaine – Union européenne, premier du nom, fut un autre rendez-vous incontournable de cette année 2017. Au menu des échanges : la jeunesse, l’éducation, la sécurité et les relations économiques entre l’Afrique et l’Europe.

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Classe Internationale a mis à l’honneur une Afrique pluridimensionnelle au coeur de ses réflexions, en vous proposant sa lecture de la « négritude » de Senghor, son analyse des conséquences des printemps arabes pour des Etats comme la Libye ou encore les enjeux de conflits plus anciens en République Démocratique du Congo ou en Ethiopie. Nous avons également voulu souligner les opportunités de développement que l’Afrique donne à voir, notamment par l’urbanisation, et la bonne gouvernance : en somme une Afrique jeune, durable et dynamique, préparant son avenir grâce à une jeunesse de plus en plus impliquée dans l’accroissement de la démocratisation et la compétitivité du continent.


AMÉRIQUE DU NORD

AN

Etats-Unis

20 janvier 2017. Donald Trump est investi 45ème Président des Etats-Unis d’Amérique après son élection choc en novembre 2016. Depuis, l’administration de la Maison Blanche n’a cessé d’enchaîner les coups médiatiques, en redéfinissant la politique diplomatique des Etats-Unis et leur intervention  sur la scène internationale.

La mesure phare qui marque les premières semaines du mandat de Donald Trump est celle du “muslim ban”. Ce décret anti-immigration du 27 janvier vise les ressortissants du Yémen, du Soudan, de la Libye, la Syrie, la Somalie, l’Iran, l’Irak et du Soudan, considérés comme des « pays à risque ». En septembre, il retire de la liste le Soudan et l’Irak, et ajoute la Corée du Nord et le Tchad – ainsi qu’une liste de citoyens liés au gouvernement vénézuélien. Interdisant pendant 90 jours l’entrée aux Etats-Unis aux voyageurs de plusieurs pays musulmans, le premier décret a été bloqué par des Etats fédéraux avant que la Cour suprême ne le valide le 4 décembre.

L’ajout de la Corée du Nord en septembre à cette liste anti-immigration s’explique par les vives tensions qui ont bousculé l’été 2017, après les multiples essais nucléaires de Pyongyang. Le 3 septembre, Kim Jong-un procède à son sixième essai nucléaire, seize fois plus puissant que la bombe d’Hiroshima. Ces tensions représentent une nouvelle difficulté pour la communauté internationale, et particulièrement pour les Etats-Unis qui sont directement visés par le régime nord-coréen, qui annonce le 29 novembre que le Hwasong-15 peut atteindre le territoire américain. En réponse à ces nombreuses provocations, Donald Trump menace Pyongyang « du feu et de la fureur », avant de s’enfoncer dans une joute verbale avec Kim Jong-Un. Toutefois, son action politique reste vague et peu concrète face aux provocations nucléaires de la Corée du Nord. Classe Internationale a analysé cette situation délicate en septembre dernier.

Sans avertir ses partenaires à propos de la question syrienne, Donald Trump lance une action militaire unilatérale en Syrie le 4 avril. Une base aérienne syrienne est détruite par 59 missiles américains, à la suite d’une attaque chimique au gaz sarin imputée au régime de Damas par l’ONU et les pays occidentaux.

Voulant rompre radicalement avec la politique de son prédécesseur démocrate, Donald Trump remet en question l’accord sur le nucléaire iranien, négocié avec beaucoup de difficultés par Barack Obama en 2015. Durant sa campagne présidentielle, le candidat souhaitait déjà « déchirer » l’accord nucléaire. S’il n’a pas mis en action ses paroles, il laisse toutefois planer le doute quant à sa position vis-à-vis de l’Iran, après avoir refusé en octobre de certifier l’accord.

Donald Trump souhaite abandonner la stratégie du pivot asiatique, et s’est donc retiré officiellement du  TTP (Partenariat transpacifique) le 23 janvier. Cet accord de libre-échange, signé en 2015 par 12 pays d’Asie-Pacifique représentant 40% de l’économie mondiale, avait pour but de contrer l’influence grandissante de la Chine dans la région, mais n’était pas encore entré en vigueur.

Dans le même esprit, le 1er juin 2017, Donald Trump se retire du Traité de Paris, signé lors de la COP21 de novembre 2015, qui avait marqué un grand pas pour la coopération internationale en matière de protection de l’environnement. Pour le président américain, cela permettrait de recréer des emplois aux Etats-Unis. Ce retrait a été unanimement condamné par la communauté internationale, mais a permis au Président Emmanuel Macron de transformer ironiquement le slogan de campagne de Trump pour affirmer qu’il faut « Make our planet great again ». Cela a abouti à la création du mouvement We are still in en novembre 2017 lors de la COP23, rassemblant des villes et des chefs d’entreprise américains qui soutiennent toujours l’accord sur le climat.

En ce qui concerne la politique intérieure, les Etats-Unis sont secoués par des événements qui font la une dans le monde entier. Le 21 janvier, au lendemain de l’investiture du nouveau Président, la Marche des femmes mobilise des manifestations partout aux Etats-Unis et aussi dans le monde, pour défendre les droits des femmes contre la menace que fait peser Trump. Ce combat pour l’amélioration de la condition féminine a été amplifié après les révélations le 5 octobre des nombreux abus et intimidations sexuels commis par Harvey Weinstein et d’autres personnalités importantes d’Hollywood.

Sur le plan politique, de nouvelles révélations bouleversent la société américaine, notamment la question de l’ingérence russe dans la campagne présidentielle. L’enquête, déjà dénoncée avant l’élection de novembre 2016, dure désormais depuis plus d’un an. Le 4 décembre, une enquête fédérale est ouverte et le Général Michael Flynn, qui fut conseiller de la Maison Blanche à la Sécurité pendant une courte période, est inculpé par le FBI.

Des catastrophes ébranlent la société américaine : l’ouragan Irma frappe les côtes de la Floride le 6 septembre, et près de 6 millions de personnes sont évacuées. Le tragique attentat de Dallas du 1er octobre fait 59 morts et plus de 520 blessés, et est revendiqué par l’Etat Islamique – même si les motivations du tueur restent floues. Le même mois, le 31 octobre, un conducteur fauche des passants dans les rues de Manhattan à New-York, faisant 8 morts (dont le terroriste) et 12 blessés. L’attentat est lui aussi revendiqué par l’Etat Islamique.

Le passé esclavagiste des Etats-Unis refait surface après le meurtre d’une militante anti-raciste à Charlottesville par des suprémacistes blancs en août, et le déboulonnage des monuments à la gloire des Confédérés au cours de l’été. Même s’il n’a pas ouvertement défendu les suprémacistes blancs, Donald Trump a été vivement critiqué pour avoir regretté « la beauté qui est retirée des villes et des parcs ».

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Canada

L’année 2017 marque le 150ème anniversaire du Canada, mais cet anniversaire est troublé par la fusillade du 29 janvier dans une mosquée de Québec, qui fait 6 morts et 8 blessés.

En mai, Donald Trump s’en prend aux pratiques commerciales du Canada, qu’il juge “inéquitables”, notamment envers les producteurs laitiers américains, et promet de revoir les accords commerciaux entre les deux pays. Quelques jours plus tard, Trump instaure une taxation de 20% du bois d’œuvre canadien. Ces événements refroidissent les relations entre les deux pays, qui renégocient l’ALENA (Accord sur le libre-échange nord-américain) depuis plusieurs mois.

Le Sénat canadien adopte en juin le projet de loi C-16 qui criminalise la discrimination fondée sur l’identité ou l’expression de genre. En août, le gouvernement annonce la possibilité d’indiquer un « X » pour désigner le sexe dans les passeports. Continuant dans sa lancée, Justin Trudeau présente des excuses officielles aux communautés LGBT+, particulièrement ciblées par les injustices dans la fonction publique fédérale et dans l’armée.

A l’été 2017, une forte immigration illégale touche les frontières canadiennes, après que le Président américain ait menacé ces populations de leur retirer leur droit de résidence temporaire. Les demandes d’asile explosent, et plus de 250 personnes entrent au Canada chaque jour fin juillet.

L’année 2017 est aussi marquée par l’entrée en vigueur provisoire du CETA entre le Canada et l’UE (Comprehensive Economic and Trade Agreement), signé en 2016 par les deux parties. Il est appliqué provisoirement dès le 21 septembre, en attendant que tous les parlements des Etats-membres de l’Union Européenne aient ratifié le traité – ce qui peut prendre plusieurs années. Cet accord supprime près de 99% des droits de douane et vise à augmenter les échanges commerciaux entre le Canada et l’UE d’environ 25%.


AMÉRIQUE DU SUD

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L’année 2017 a en général constitué une embellie au niveau économique pour le continent sud-américain. Après deux années de récessions consécutives le continent a connu une timide reprise économique avec une croissance à hauteur de 1,9% et qui devrait se poursuivre en 2018.

La situation s’est aggravée au Venezuela

La crise économique et sociale, qui a fait chuter le PIB du pays de 12% en 2017, s’est approfondie en une crise politico-institutionnelle. Le 29 mars, la Cour suprême s’est octroyée les pouvoirs du Congrès acquis à la La Mesa de la Unidad Democrática (MUD), la coalition d’opposition au régime de Nicolas Maduro. Dans les semaines qui suivent, Caracas et plusieurs autres grandes villes du pays connaissent des manifestations massives. La situation continue de s’envenimer le 1er mai lorsque le président Maduro annonce la convocation d’une assemblée constituante, que l’opposition boycotte et contre laquelle elle appelle à manifester. Les violences qui éclatent en marge des manifestations font 125 morts, majoritairement dans l’opposition. Après l’élection de la constituante, Maduro semble reprendre la main et remporte face à une opposition divisée et résignée 17 des 23 régions aux élections d’octobre. Le 11 décembre 2017, Maduro menace désormais de bannir les principaux partis d’opposition des élections d’octobre 2018, où il briguera un second mandat. Pendant ce temps l’hyperinflation a dépassé les 1000% et les pénuries continuent de rendre difficile le quotidien des Vénézuéliens.

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Au Brésil, le scandale Odebrecht éclabousse toute l’Amérique Latine

La multinationale brésilienne, première du secteur  BTP en Amérique latine, est accusée d’avoir mis en place un système généralisé de pots de vin, touchant une majorité de pays latino-américains. Marcelo Odebrecht, le PDG de l’entreprise, a été condamné à dix ans de prison par le juge Sergio Moro, qui est en charge de l’opération Lava Jato – le fameux « lavage express » dont il est à la tête depuis maintenant deux ans. Si l’ex-président Lula a fait appel de sa condamnation à une peine de neuf ans de prison, le scandale s’est surtout étendu au reste de l’Amérique latine au cours de l’année. En Équateur, le vice président Jorge Blas a été condamné à six ans de prison, tandis que l’ancien ministre colombien des transports Gabriel Garcia Morales écope de cinq ans de prison en Colombie.

Les pays des Caraïbes sont également touchés, à l’image de la République dominicaine, troisième pays du continent à avoir perçu le plus de pots de vin, et dont la justice a arrêté le ministre du commerce Temistocles Montas. Le 17 décembre Marcelo Odebrecht a passé un accord  avec la justice brésilienne pour purger la fin de sa peine en résidence surveillée, dans le confort de sa villa de 3 000 m2 à Sao Paulo, en échange d’informations. L’année 2018 devrait donc voir se poursuivre le scandale et ainsi continuer affecter la sphère politique latino-américaine.

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Le Chili a viré à droite

L’ancien président conservateur Sebastian Piñera a remporté les élections présidentielles au Chili. En effet le socialiste Alejandro Guillier, héritier de Michelle Bachelet, n’a pas réussi à remobiliser au second tour un électorat progressiste déçu par le second mandat en demi-teinte de cette dernière, qui n’a pas tenu sa promesse de campagne de proposer une nouvelle constitution, l’actuelle ayant été mise en place au moment de la dictature sous Pinochet. Les déçus de la sociale- démocratie s’étaient tournés vers la gauche radicale du Frente amplio (Front large), qui avait créé la surprise en arrivant troisième au premier tour avec 20% des suffrages, quand les sondages ne lui en attribuaient pas plus de 8%. Nous vous parlions dans cet article des élections chiliennes et de leurs enjeux.

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La venue du Pape François pour encourager une paix laborieuse en Colombie

Dans un pays en liesse pour sa venue, le pape François s’est fait l’avocat d’un processus de paix dont l’application semble de plus en plus laborieuse. Certes, les Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC) ont bien rendu les armes en 2017, et se sont transformées en parti politique, la Fuerza Alternativa Revolucionaria del Común (FARC).

Au coeur d’une zone de démobilisation FARC, que sont devenues les promesses de la paix ?

Leur leader, Timotchenko, a même annoncé sa candidature aux prochaines présidentielles de 2018, ravivant des tensions à peine apaisées dans la société colombienne. La paix reste cependant particulièrement fragile. En plus des difficultés de réinsertion dans la société que connaissent les anciens guérilleros, 36 d’entre eux ont ainsi été assassinés au cours de l’année, mettant à mal la promesse du gouvernement colombien de garantir la sécurité des ex-combattants. La question continuera d’être centrale en 2018 avec les élections présidentielles qui se profilent.

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Trump refroidit les relations avec Cuba

Le 16 juin 2017, le président américain a annoncé le rétablissement de certaines des mesures d’embargo économiques, rompant ainsi brutalement avec la dynamique enclenchée par son prédécesseur, Barack Obama.

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PPK dans la tourmente au Pérou

Les accusations de corruption liées au scandale Odebrecht ont également touché Pedro Pablo Kuczynski (PPK). Le président péruvien a survécu à une tentative de destitution interne le 21 décembre 2017. Le coût politique a cependant été important puisque PPK a dû négocier l’amnistie de l’ancien président Fujimori avec le fils de ce dernier en échange d’une abstention de dix députés de son parti, Fuerza Popular au parlement lors de la procédure. Depuis de nombreuses voix se sont élevées dans tout le pays pour protester contre l’amnistie de Fujimori qui avait été condamné en 2009 à 25 ans de prison pour son implication dans deux massacres de militants du Sentier Lumineux.


EUROPE

europe

L’année 2017 a été une année riche en évènements en Europe. Si elle a été au cœur de différentes tourmentes, Classe Internationale a décidé de se concentrer sur quelques dossiers, en 2017, qui explicitent les événements qui s’y sont déroulés.

Le Royaume Uni entre pour de bon dans le Brexit

L’Union Européenne s’est retrouvée dans le feu des projecteurs en 2017, avec l’activation officielle de l’article 50 du Traité sur l’Union Européenne. Le 29 mars, avec la notification britannique de la volonté d’activer l’article 50, qui suit le vote du référendum de juin 2016, le Royaume Uni a commencé le compte à rebours de deux ans avant la sortie officielle du pays de l’Union Européenne. Cette décision, qui avait déjà mené en 2016 à la démission du Premier Ministre David Cameron, a continué d’animer les débats au sein du pays. En effet, après l’activation de l’article 50, Theresa May a décidé d’organiser des élections législatives anticipées en juin 2017 pour asseoir sa légitimité lors des négociations avec l’Union Européenne. L’enjeu de ces élections était de déterminer si les Britanniques voulaient un « hard Brexit » ou non, un “hard Brexit” signifiant la rupture de la coopération avec l’Union sur les questions d’immigration et une sortie du marché unique européen, opposé à un “soft Brexit”. Le pari de Theresa May fut cependant assez hasardeux : dans un pays très divisé par la question du Brexit où les partis traditionnels semblaient en pleine crise de légitimité, le parti conservateur n’a obtenu qu’une majorité relative, et pas la majorité absolue, à la Chambre des Communes. Cette victoire électorale en demi-teinte affaiblit de fait la position de May et du parti conservateur pour négocier un « hard Brexit ». Si ces résultats mitigés n’ont pas donné lieu à des nouvelles élections, le retour en force du Labour et le difficile jeu des alliances pour May avec les autres partis conservateurs affaiblissent sa position dans les négociations avec l’Union Européenne qui sont encore peu avancée à la fin de l’année 2017.

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Hongrie : Viktor Orban continue à défier l’Union Européenne

Avril 2017 a été marqué en Hongrie par un nouvel épisode de division entre les pro- et anti-Orban, sur la question de l’Université. Visant en particulier le milliardaire George Soros, et la Central European University (CEU), le Premier Ministre Hongrois a fait passer au parlement, le 4 avril 2017, une loi visant à ne reconnaitre que les diplômes d’université extra-européennes qui bénéficieraient d’accords bilatéraux entre le pays d’origine et la Hongrie. Après les oppositions du gouvernement Orban sur la politique migratoire européenne et les accusations d’atteinte aux droits humains, cet épisode a été synonyme, en Hongrie, d’une scission accrue de la société, opposant des conservateurs à la position ambiguë sur l’Union Européenne et ses valeurs à des sociaux-libéraux pro-européen, qui se discréditent mutuellement dans les médias acquis à leurs causes.

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Allemagne : 2017 marquée par la vulnérabilité face au populisme

L’année 2017 aura été marquée par l’ascension et le succès du parti d’extrême droite populiste AfD (Alternative für Deutschland). Le jeune parti, créé il y a seulement quatre ans, est devenu l’une des forces politiques incontournables de la vie politique allemande. Se nourrissant des critiques du gouvernement Merkel sur la conduite de la politique migratoire du pays et de la gestion des questions identitaires, son accession au Bundestag en 2017 fut très symbolique. En effet, c’est la première fois depuis la Seconde Guerre mondiale qu’un parti d’extrême droite accède à l’assemblée législative allemande, en dépassant les 5% des voix exprimées, nécessaires à l’entrée au Bundestag.

De plus, l’AfD a capté les voix de la droite traditionnelle, jouant sur la déception de la politique de Merkel sur l’immigration, et de la Grande Coalition avec le SPD qui s’apprête à être renouvelée. Cette captation a été dénoncé comme l’une des raisons pour lesquelles le parti de la chancelière, la CDU, n’a pas obtenu la majorité des sièges au parlement, le forçant à nouveau à faire une coalition. Cet avènement de l’AfD vient en parallèle de la montée de partis populistes et eurosceptiques à travers l’Europe, le parti entretenant des liens forts avec le Front National français ou encore la Lega Nord italienne. En conséquence, c’est la SPD, parti social démocrate le plus ancien d’Allemagne, qui est le grand perdant de cette élection, avec à peine autour de 20% des voix, son score le plus bas depuis la Seconde Guerre mondiale.

Les conséquences de cette ascension sont multiples au niveau du national allemand et de l’international. La question du populisme en Europe est plus que jamais dans tous les esprits après cet épisode de l’AfD qui affaiblit considérablement la position de la chancelière dans son pays, et de l’Allemagne en Europe, pour laquelle une refonte franco-allemande du projet d’intégration n’est plus une priorité.

Victoire en demi-teinte pour Angela Merkel

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Russie : l’heure du bilan pré-électoral

2017 a été l’année de la remise en question en Russie, entre reprise économique après la crise de change de 2014, dont on ne connait pas encore l’issue, scandale en Tchétchénie, accusation d’ingérence dans les élections américaines de 2016, enlisement en Ukraine et apaisement en Syrie, 2017 a été une année aux multiples enjeux.

Vladimir Poutine, auquel les médias russes sont acquis, n’a pas vraiment d’opposant dans l’élection à venir, dont le premier tour aura lieu en mars ; ainsi pourra-t-il utiliser la plupart de ces évènements à son avantage, en en contrôlant la narration comme il l’a fait en 2017. Néanmoins, 2017 nous a montré que, même au sein du pays, la toute puissance et l’exemplarité du chef de l’Etat ne sont plus aussi intactes qu’auparavant. C’est sur cette vulnérabilité que son opposante Ksenia Sobtchak, qui demeure très proche de Poutine sur le plan des idées et de relations, fonde sa campagne. Elle remet en cause la capacité du chef de l’Etat russe à contrôler les ardeurs des plus radicaux au sein de la Fédération, en témoigne les exactions contre les homosexuels en Tchétchénie. 2017 en Russie est donc une année charnière, dont l’issue en 2018 déterminera la stabilité politique et économique du pays, et sa capacité de projection à l’international.

Le rapport « Russie 2017 » de l’Observatoire franco-russe


 

Cette année, des puissances ont été ébranlées, d’autres renforcées. Les contrastes en Europe se sont accentués, l’Amérique du Sud tente de trouver la paix. L’Asie est instable mais incontournable dans les jeux de pouvoir mondiaux, face à une Amérique du Nord que l’on peine à comprendre. Le Moyen-Orient inspire à la fois peurs et espoirs, tandis que l’Afrique prend le tournant d’un avenir redynamisé par sa jeunesse.

En 2018, nous nous efforcerons de décrypter cette actualité d’un monde changeant, en proie à des dilemmes insolvables, parfois effrayant mais surtout passionnant.

 

Classe Internationale

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